Les vêtements connectés arrivent! Mais à quoi nous connectent-ils vraiment? A une meilleure qualité de vie, ou à un système de contrôle généralisé dont ils ne seront qu’un relais de plus?
8 mars 2019. Tom Shark déambule dans le centre commercial monégasque qu’il fréquente habituellement lors de ses séjours en Principauté. Après avoir découvert les dernières créations de Philippe Plein, il furète dans les boutiques de luxe pour identifier les tendances actuelles et choisir quelques articles pour ses enfants. Arrivé à la nouvelle boutique Frozen, il constate en vitrine la présence de vestes aux couleurs chatoyantes, comportant des capteurs protéiformes. Intrigué il interroge la vendeuse: «à quoi servent ces capteurs, Madame?». Elle sourit et lui répond avec aplomb: «à susciter les questions de clients, cher Monsieur, et à leur permettre de susciter l’intérêt de tout un chacun lorsqu’ils porteront ces habits». Quelque peu désabusé Tom quitte cette boutique en se disant qu’il y a décidément mieux à faire de la technologie actuelle en termes de vêtements connectés. Certaines marques ont intégré à leur gamme de produits des fonctionnalités telle que l’évaluation du stress ou la recharge de différents appareils électroniques… à l’aune du vocabulaire de la Génération Y, rien de tripant à ce stade donc.
9 mars 2028. Tom Shark s’élance depuis l’hôtel Métropole pour son jogging quotidien. Il sait devoir courir 9 kilomètres à un rythme soutenu sur les deux tiers du parcours. Après avoir contourné le mythique Casino et longé l’hôtel de Paris, il accélère dans la descente qui le conduit à la Chapelle Sainte Dévote. C’est alors que son écran tactile intégré à son survêtement se met à vibrer. Un message rouge clignote: «attention, selon nos capteurs, votre tendon d’Achille est en train de lâcher! Décélérez immédiatement!». Tom suit le conseil de son assistant d’entraînement qui analyse en temps réel chaque muscle. C’est alors que le téléphone se met à sonner. Il répond au moyen de son oreillette: «Tom, venez me voir immédiatement, car je crains une blessure pérenne». Tom reconnaît la voix de son physiothérapeute Grégoire qui le suit depuis deux ans et comprend que la situation est sur le point de virer au cauchemar. Il hèle un taxi et se rend tout de suite au cabinet. À son arrivée, son traitement est prêt. Le tissu cicatriciel doit absolument être amélioré. Une heure plus tard, Tom est de retour à son hôtel. Avec un bon suivi médical et du repos, il pourra courir à nouveau à brève échéance.
Différents problèmes doivent encore être résolus avant que les vêtements connectés ne permettent de suivre en temps réel et d’améliorer la santé des personnes qui les portent. La crainte d’effets néfastes liés à une surexposition aux ondes électromagnétiques, de même que le coût de fabrication ou encore la question de l’hygiène sont des freins actuels qui devraient être rapidement surmontés. Reste à savoir pour chacun d’entre nous si nous souhaitons augmenter notre durée de vie au prix d’une surveillance permanente de notre état de santé et d’un interventionnisme qui s’avérera onéreux ou si, au contraire, nous acceptons notre humanité avec ses conséquences inévitables pour les simples mortels que nous sommes.
Cet article est paru le 10 mars 2019 dans L’Antipresse.